Internet est le premier vecteur d’information, le contrôler signifie donc contrôler l’information. Les différents gouvernements autoritaires l’ont bien compris et n’hésitent pas à censurer le contenu qui leur déplaît : place Tiananmen en Chine, Wikipédia dans de nombreux pays, etc… Cette censure empêche des centaines de millions de personnes d’accéder à des informations libres partout autour du monde.

Des chercheurs luttent pour contourner cette censure, jouant aux chats et à la souris avec les gouvernements totalitaires. Chaque fois qu’ils trouvent une nouvelle faille, le gouvernement finit par la boucher, il faut alors en trouver une nouvelle. Dans cette course, les chercheurs sont largement désavantagés car ils doivent chercher manuellement pour trouver des failles, un processus très chronophage.

Heureusement, des chercheurs de l’Université de Maryland sont parvenus à développer un nouvel allié dans cette course contre la censure : Geneva (pour Genetic Evasion). Cette intelligence artificielle a été testée au Kazakhstan, en Inde et en Chine. Dans chacun de ces pays elle est parvenue à trouver des failles dans les systèmes de censure. D’après les chercheurs, ces failles sont introuvables pour l’Homme.

Comment cela fonctionne ? Sur internet, les échanges entre l’ordinateur envoyant l’information et l’ordinateur récepteur sont séparés en pack de données. Les régimes autoritaires bloquent les requêtes avec des packs de données contenant des mots clés comme Tiananmen. C’est là qu’intervient Geneva. L’IA agit en arrière-plan dans un navigateur internet et modifie en temps réel la façon dont est séparé l’information en packs pour berner le système de censure.

La particularité de Geneva réside dans son mode de recherche. Habituellement, les chercheurs identifient comment un système de censure fonctionne pour trouver des failles. Geneva au contraire, essaie des possibilités à l’aveugle jusqu’à en trouver une qui fonctionne. Son fonctionnement est inspiré de la génétique : l’IA conserve les morceaux de code qui fonctionnent et abandonnent les autres. Elle est ainsi capable d’identifier plusieurs stratégies pour contourner la censure très rapidement.

Les chercheurs ont confronté Geneva à l’intégralité des systèmes de censure déjà vaincus. En seulement quelques jours l’IA est parvenue à trouver l’ensemble des solutions précédemment trouvées dans toutes les études existantes. En Chine, Geneva permet de naviguer sans censure autour de certains mots clés, et ce, depuis un simple navigateur Google Chrome sans VPN. Les chercheurs comprennent toutefois qu’il y a de nombreuses raisons pour lesquelles les habitants des pays sous régime autoritaire pourraient ne pas vouloir défier ledit gouvernement en installant Geneva sur leurs appareils. Les chercheurs espèrent donc parvenir à installer Geneva sur le serveur plutôt que sur l’ordinateur de l’utilisateur. S’ils y parviennent, des sites comme Wikipédia deviendrait accessibles pour tous dans les pays qui les bloquent actuellement, et ce, sans que les utilisateurs n’aient quoi que ce soit à installer.

Geneva est un projet ambitieux qui rééquilibre les forces dans la lutte autour de la censure sur internet. Toutefois, il est peu probable que les gouvernements totalitaires ne réagissent pas. Peut-être développeront-ils leurs propres IA pour faire face à Geneva ?